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Planche XVII: idiot

Queneau est entrée à la Salpetrière en 1781, âgée de 10 ans. Elle est constamment exposée à l'air, quelque temps qu'il fasse; elle tend la main à tout le monde pour obtenir quelque pièces de monnaie, avec lesquelles elle achète des aliments, car elle a un grand appétit. Il faut l'habiller ; lorsqu'elle essaye de parler, elle fait entendre un cri rauque ou une sorte de grognement articulé et saccadé qu'elle répète jusqu'à ce qu'on l'ait comprise. Elle discerne au geste ce qu'on veut lui dire, pourvu qu'on ne s’éloigne pas des besoins les plus ordinaires de la vie. Elle est reconnaissante pour la fille de service qui la soigne, et pour les personnes qui lui donnent de l’argent ou de quoi manger, et elle exprime sa reconnaissance en baissant ses doigts et en levant les yeux au ciel. Elle comprend lorsqu'on lui parle lentement et à haute voix. Habituellement douce, elle se met en colère lors-qu'elle ne peut satisfaire sa gloutonnerie, elle déchire ses vêtements excepté sa chemise qu'elle conserve par pudeur, ayant soin de couvrir sa gorge avec ses mains. Elle n'a jamais pu apprendre aucun métier. 

Cette imbécile est néanmoins musicienne. Voit-elle danser, elle saute en mesure, entend-elle chanter, elle répète d'une voix rauque non les paroles, mais les airs; elle en sait un grand nombre. Un élève de la Salpetrière joue du violon, Queneau suit l'air et avec une curieuse attention, elle recherche d'où il peut venir, et se rapproche peu à peu du musicien. Queneau est tout oreille. Attentive, elle répète les airs joués. 

Le 25 août 1833, M. Litz, sur l'invitation de M. Leuret, voulut bien se prêter aux expériences suivantes, qui furent faites, M. le docteur Mitivié présent, dans le cabinet de M. Pariset, médecin de la division des aliénés de la Salpetrière. M. Litz improvise plusieurs airs, Queneau les saisit, mais éprouvant de la difficulté à les répéter, sa voix ne pouvant s'élever au ton sur lequel a chanté le célèbre musicien, les traits de cette fille expriment l'effort de la contrariété. M. Litz touche du piano; Queneau est immobile, les yeux attentifs sur les doigts du grand artiste ou bien elle entre dans une sorte de mouvement convulsif, se tord en divers sens, mord ses poings, frappe du pied, lève les yeux au ciel, et fait des efforts pour se mettre à l'unisson. Le passage des sons graves aux sons aigus provoque une contradiction soudaine de tous les muscles de Queneau, comme si elle était atteinte par une décharge électrique. Cette dernière expérience, renouvelée plus de vingt fois, a eu toujours le mème résultat. Malgré cette singulière capacité musicale, le crâne de Queneau n'offre point le renflement que Gall a signalé comme indicateur de l'organe de la musique. Voyez planche XVII. 

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